– Laurent, as-tu fait tes devoirs?
– Je n’en ai pas, papa!
– As-tu regardé dans ton agenda?
– Hein?

Laurent dépose sa tablette, prend l’agenda dans son sac et vient me voir. Je lui avais pourtant dit de ne pas répondre tout de suite au jeu-questionnaire que sa grand-maman Violette lui avait fait parvenir par courriel.
- Regarde, Laurent, tu dois compléter ta carte du Canada. C’est pour vendredi, donc après-demain. Tu peux peut-être prendre un peu d’avance?
- Est-ce que je peux trouver une carte du Canada sur ma tablette?
Petit rusé, va…
Pardonnez mon côté vieux jeu, mais une maisonnée sans devoirs m’apparaît comme un plat de spaghettis sans pâtes.
Je sais que ces derniers temps, le débat sur les devoirs à la maison est entamé, qu’il y a ceux et celles qui aimeraient un allégement tangible, voire une disparition des devoirs à la maison. D’autres, en revanche, y tiennent afin que leur enfant revoit ce qu’il a appris dans la journée. Et cela donne quelques signaux aux professeurs sur ce qui a été compris ou non.
Chez moi, autisme pas autisme, il faut des devoirs.
Pas trop (il faut respecter le rythme d’apprentissage de Laurent) mais il en faut!
Les devoirs font certes partie de la tradition dans la maison Saucier, et ce, depuis le début des études primaires! Mais ils font également partie d’une routine pour Laurent.
La routine… le meilleur ami de l’autiste!
Routine du matin, routine du soir, routine de l’autobus (avec consultation de la montre minute par minute), routine des courses (qui EXIGE une liste complète et qui ne tolère pas les achats non répertoriés dans ladite liste), routine du dodo, etc.
Donc, les devoirs répondent à une routine, à un acte répétitif qui rassure Laurent, d’une certaine manière. Premièrement, parce qu’il peut meubler son temps jusqu’à l’heure du souper et que, selon la longueur des devoirs et des leçons, il peut aussi prévoir le déroulement de sa soirée jusqu’à la période du bain, des gouttes pour l’œil gauche (un chapitre parmi tant d’autres sur sa naissance prématurée), de l’hygiène buccale, des toutous qui lui disent bonne nuit, et du dodo!
Au primaire, il y avait des devoirs. Parfois juste assez, parfois beaucoup.
Laurent étudiait dans une école française qui misait sur un enseignement traditionnel « de qualité », et les devoirs faisaient partie intégrante de ce leitmotiv!
Au secondaire toutefois, les devoirs ont pris beaucoup trop de place.
Pour faire une histoire courte, le collège privé qui a accepté Laurent l’avait placé dans son programme international plutôt que dans son programme adapté pour la simple et bonne raison qu’on y enseignait surtout les langues, l’histoire, la géo et que les maths étaient présentées avec une approche historique qui plairait certainement à Laurent.
Sauf que des devoirs, Laurent en complétait sept jours sur sept, parfois jusqu’à 23 h 30.
Un soir, ma femme a pris l’initiative de lui souffler les réponses, et ce, au grand dam de Laurent qui se disait « j’ai une tâche à faire, je dois l’accomplir ». Semble-t-il que les autres élèves de sa classe étaient submergés. Sauf qu’eux pouvaient suivre le rythme. Pas Laurent.
Son arrivée en classe TSA a été bénéfique pour tout le monde.
De janvier à juin, on se serait cru en vacances… Pourquoi? Parce que des devoirs… il n’y en avait pas! Heureusement que son tuteur passait à la maison deux soirs par semaine pour faire la récupération de maths! Non seulement cela aidait à la routine, mais aussi venait quelque peu court-circuiter la routine tablette!
- Alors, ces devoirs?
- Oui, oui, papa! Euh… papa?
- Oui, fiston?
- La tour Eiffel, c’est le symbole de quelle ville?
- Laurent, les questions de grand-maman, tu y répondras après tes devoirs!
- Mille milliards de mille sabords!
Chez vous, la dynamique des devoirs se déroule comment?