Vous savez, les enfants, je suis née à une autre époque. Dans une famille différente de la vôtre, avec des valeurs et des façons de faire différentes. Je n’ai concrètement manqué de rien, et mes parents, bien que présents physiquement, étaient très peu affectueux. Ils ne me disaient que très rarement qu’ils m’aimaient. Tout ça pour vous dire, les enfants, que les mots « je t’aime », de la part de mes parents, ont rarement résonné à mes oreilles quand j’étais petite.

Je ne le leur reproche pas, mais ça explique probablement, en partie du moins, pourquoi ces mots ne me sont pas naturels aujourd’hui. Et pourquoi, mes enfants, je vous dis que je vous aime chaque jour, mais probablement pas assez. L’amour immense et inconditionnel que j’ai pour vous est pourtant bien présent, et même si je ne vous le dis sûrement pas assez souvent en mots, je vous l’exprime tous les jours à votre insu, par mille petits gestes quotidiens.
Quand j’écoute vos histoires, vos questions et vos anecdotes parfois décousues, parfois interminables, que je vous écoute me parler de vos amis, de vos enseignants ou de vos matières et activités préférées à l’école, avec intérêt et curiosité, je vous dis : « Je t’aime ».
Quand je vous cuisine un repas rempli de vitamines et de saveurs et que je le dépose sur la table, fière d’avoir pris le temps et la peine de bien remplir votre petit corps, je vous dis : « Je t’aime ».
Quand je m’implique à la bibliothèque ou au conseil d’établissement de l’école pour y apporter des idées ou des projets et faire évoluer, à ma façon, votre environnement, je vous dis : « Je t’aime ».
Quand je vous répète cinquante fois les mêmes règles de sécurité, que vous hochez la tête d’un air exaspéré en me disant que je vous l’ai déjà dit mille fois, et que je le répète encore une fois de plus, je vous dis : « Je t’aime ».
Quand je participe aux ateliers dans votre classe, parce que je m’intéresse à vos activités et apprentissages scolaires, parce que j’aime voir comment vous interagissez avec vos amis et votre enseignant, et parce que je trouve important de m’impliquer dans votre milieu de vie quotidien, je vous dis : « Je t’aime ».
Quand, l’hiver, je descends votre tuque sur vos oreilles ou que je remonte pour la cinquième fois votre fermeture éclair jusqu’à votre menton afin de m’assurer que vous n’avez pas froid, je vous dis : « Je t’aime ».
Quand je m’assure d’être présente à vos spectacles, activités spéciales, parties de soccer ou séances de natation, et que je vous regarde y évoluer avec fierté, je vous dis : « Je t’aime ».
Quand j’insiste, plusieurs fois par semaine, pour faire avec vous vos devoirs et leçons, malgré votre découragement ou votre envie de continuer à jouer, parce que je tiens à ce que vous consolidiez vos apprentissages et que vous progressiez, à votre rythme, je vous dis : « Je t’aime ».
Quand je prends le temps de jouer à votre jeu préféré, de faire du bricolage avec vous, de faire semblant de manger votre sandwich en plastique pour la dixième fois, ou que je regarde votre cinquième spectacle maison avec enthousiasme, je vous dis : « Je t’aime ».
Quand je vous lis une histoire tous les soirs pour susciter en vous l’amour des mots et de la lecture, enrichir votre imaginaire et votre vocabulaire, je vous dis : « Je t’aime ».
Quand je vous prends par la main pour marcher chaque matin jusqu’à l’école, après avoir veillé à ce que votre sac soit rempli de tout ce dont vous avez besoin pour travailler, et que votre boîte à lunch regorge d’aliments qui vous fourniront l’énergie nécessaire pour apprendre toute la journée, je vous dis : « Je t’aime ».
Quand je prends soin de vous lorsque vous êtes malades ou que j’attends pendant quatre heures à la clinique avec vous, je vous dis : « Je t’aime ».
Je ne vous dis peut-être pas je t’aime en mots très souvent, les enfants, mais soyez assurés que je vous le dis tous les jours à votre insu, par mille petits gestes quotidiens.